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Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/42

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date précise, de tel jour, de telle année, qu’il est impossible de renfermer dans des limites rigoureuses, et qui n’en sont pas moins des faits comme d’autres, des faits historiques, qu’on ne peut exclure de l’histoire sans la mutiler.

La portion même qu’on est accoutumé à nommer la portion philosophique de l’histoire, les relations des faits entre eux, le lien qui les unit, les causes et les résultats des événements, c’est de l’histoire, tout comme les récits de batailles et de tous les événements extérieurs. Les faits de ce genre, sans nul doute, sont plus difficiles à démêler ; on s’y trompe plus souvent ; il est malaisé de les animer, de les présenter sous des formes claires, vives : mais cette difficulté ne change rien à leur nature ; ils n’en font pas moins partie essentielle de l’histoire.

La civilisation, Messieurs, est un de ces faits-là ; fait général, caché, complexe, très difficile, j’en conviens, à décrire, à raconter, mais qui n’en existe pas moins, qui n’en a pas moins droit à être décrit et raconté. On peut élever sur ce fait un grand nombre de questions ; on peut se demander, on s’est demandé s’il était un bien ou un mal. Les uns s’en sont désolés ; les autres s’en sont applaudis. On peut se demander si c’est un fait universel, s’il y a une civilisation universelle du genre humain, une destinée de l’humanité, si les peuples se sont transmis de siècle en siècle quelque chose qui ne se soit pas perdu, qui doive s’accroître, passer comme un dépôt, et arriver ainsi jusqu’à la fin des siècles. Pour mon compte, je suis convaincu qu’il y a en effet une destinée générale de l’humanité, une transmission du dépôt de la civi-