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Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/41

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C’est qu’il y a dans le génie français quelque chose de sociable, de sympathique, quelque chose qui se répand avec plus de facilité et d’énergie que dans le génie de tout autre peuple : soit notre langue, soit le tour particulier de notre esprit, de nos mœurs, nos idées sont plus populaires, se présentent plus clairement aux masses, y pénètrent plus facilement ; en un mot, la clarté, la sociabilité, la sympathie sont le caractère particulier de la France, de sa civilisation, et ces qualités la rendaient éminemment propre à marcher à la tête de la civilisation européenne.

Lors donc qu’on veut étudier l’histoire de ce grand fait, ce n’est point un choix arbitraire ni de convention que de prendre la France pour centre de cette étude ; c’est au contraire se placer, en quelque sorte au cœur de la civilisation elle-même, au cœur du fait qu’on veut étudier.

Je dis du fait, Messieurs, et je le dis à dessein : la civilisation est un fait comme un autre, fait susceptible, comme tout autre, d’être étudié, décrit, raconté.

Depuis quelque temps on parle beaucoup, et avec raison, de la nécessité de renfermer l’histoire dans les faits, de la nécessité de raconter : rien de plus vrai ; mais il y a plus de faits à raconter, et des faits plus divers, qu’on n’est peut-être tenté de le croire au premier moment ; il y a des faits matériels, visibles, comme les batailles, les guerres, les actes officiels des Gouvernements ; il y a des faits moraux, cachés, qui n’en sont pas moins réels ; il y a des faits individuels, qui ont un nom propre ; il y a des faits généraux, sans nom, auxquels il est impossible d’assigner une