Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/99

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ristocratie ne sont que des empiétements sur la monarchie.

Une troisième école se présente, celle des publicistes libéraux, républicains, démocrates, comme on voudra les appeler : consultez l’abbé de Mably ; selon lui, c’était à un système d’institutions libres, à l’assemblée des hommes libres, au peuple proprement dit, qu’était dévolu, dès le cinquième siècle, le gouvernement de la société ; nobles et rois se sont enrichis des dépouilles de la liberté primitive ; elle a succombé sous leurs attaques, mais elle régnait avant eux.

Et au-dessus de toutes ces prétentions monarchiques, aristocratiques, populaires, s’élève la prétention théocratique de l’Église qui dit qu’en vertu de sa mission même, de son titre divin, c’était à elle qu’appartenait la société, qu’elle seule avait droit de la gouverner, qu’elle seule était reine légitime du monde européen, conquis par ses travaux à la civilisation et à la vérité.

Voici donc dans quelle situation nous nous trouvons. Nous avons cru reconnaître qu’aucun des éléments de la civilisation européenne n’a exclusivement dominé dans le cours de son histoire, qu’ils ont vécu dans un état constant de voisinage, d’amalgame, de lutte, de transaction ; et, dès nos premiers pas, nous rencontrons cette opinion directement contraire que, dans notre berceau même, au sein de l’Europe barbare, c’était tel ou tel de ces éléments qui possédait seul la société. Et ce n’est pas dans un seul pays, c’est dans tous les pays de l’Europe que, sous des formes un peu diverses, à des époques différentes, les divers principes de notre civilisation ont manifesté ces inconciliables