on allume des feux pour éloigner les chacals, que l’on entend glapir au fond du désert, des étoiles inconnues et quatre fois grandes comme les nôtres palpitent aux cieux ; le matin, on remplit les outres à l’oasis, on repart, on est seul, le vent siffle, le sable s’élève en tourbillons.
Et puis, dans quelque plaine où l’on galope tout le jour, des palmiers s’élèvent entre les colonnes et agitent doucement leur ombrage, à côté de l’ombre immobile des temples détruits ; des chèvres grimpent sur les frontispices renversés et mordent les plantes qui ont poussé dans les ciselures du marbre, elles fuient en bondissant quand vous approchez. Au-delà, après avoir traversé des forêts où les arbres sont liés ensemble par des lianes gigantesques, et des fleuves dont on n’aperçoit pas l’autre rive du bord, c’est le Soudan, le pays des nègres, le pays de l’or ; mais plus loin, oh ! allons toujours, je veux voir le Malabar furieux et ses danses où l’on se tue ; les vins donnent la mort comme les poisons, les poisons sont doux comme les vins ; la mer, une mer bleue remplie de corail et de perles, retentit du bruit des orgies sacrées qui se font dans les antres des montagnes, il n’y a plus de vague, l’atmosphère est vermeille, le ciel sans nuage se mire dans le tiède Océan, les câbles fument quand on les retire de l’eau, les requins suivent le navire et mangent les morts.
Oh ! l’Inde ! l’Inde surtout ! Des montagnes blanches, remplies de pagodes et d’idoles, au milieu de bois remplis de tigres et d’éléphants, des hommes jaunes avec des vêtements blancs, des femmes couleur d’étain avec des anneaux aux pieds et aux mains, des robes de gaze qui les enveloppent comme une vapeur, des yeux dont on ne voit que les paupières noircies avec du henné ; elles chantent ensemble une hymne à quelque dieu, elles dansent… Danse, danse, bayadère, fille du Gange, tournoie bien tes pieds dans