Page:Gustave Flaubert - Œuvres de jeunesse, II.djvu/284

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losophie se débat mieux, la rhétorique pérore dans ses écoles, la société agonise au milieu de tous ces bruits. Elle voudrait bien se cacher la ruine qu’elle a dans le cœur, et farder ses rides avec le parfum de quelque croyance, c’est en vain, elle ne sait laquelle adopter. Son empereur veut introduire le culte des juifs et des chrétiens, il se fait juif lui-même, il est, comme la nature, tourmenté d’une grande douleur, et, comme le monde romain, il reste haletant de débauches et d’angoisses sur ses lits de fleurs, fanées moins vite que son âme.

Tout craquait donc au cœur du vieux monde : pouvoir civil, croyance religieuse, et l’âme et le corps ; tout tombait délabré, abîmé dans un immense dégoût. Il faudra, pour ranimer cette chair flétrie, pour remettre de la force dans les muscles de ce grand corps, le long ascétisme du moyen âge et les douleurs du monde chrétien. Alors reparaîtra, au xvie siècle, cette force, cette sève, ce nouvel empire invisible substitué à l’autre, et qui s’étale splendidement sur les toiles de Raphaël et se courbe sur le monde avec la coupole de Saint-Pierre.