Page:Gustave Flaubert - Œuvres de jeunesse, III.djvu/362

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font pas disparaître. — En effet, c’est le plus bel ornement du visage d’un guerrier, reprend Ismène. — Gonnor avoue qu’il regrette d’être avec tous ses membres, mais Mars en tout l’a toujours protégé. — Il vient engager Hermance à se faire vacciner. — Qu’importent les vaines railleries d’Elfrid ? elles sont sans fondement ; c’est un homme élégant, mais peu instruit et qui ne repose pas souvent sous les sacrés bosquets. Que signifie donc ce qu’il peut dire ? qui sait d’ailleurs si les justes dieux ne sauront pas le punir ?

III

À ces mots, le même garde arrive haletant, effaré. — Elfrid est atteint du cruel fléau. — Punition des dieux ! s’écrie Gonnor en levant ses nobles mains au ciel.

IV

Jenner survient avec Agénor. — Qu’il est heureux que Gonnor en soit réchappé ! — Mais Hermance devrait bien, puisque l’opération a réussi sur Ismène… — Oui, oui, s’écrie Ismène.

… C’est un mortel divin
Prenez au nom des dieux son bienfaisant venin ;

mon père, mon amant, moi-même, tous nous lui devons la vie. On se rapproche des dieux par la science, un mortel instruit est l’image ici-bas de la Divinité, il la surpasse peut-être quand il y joint la bonté, l’humanité, la tendre pitié, car les dieux n’ont pas toujours ces qualités. — Agénor à part approuve cette idée, c’est bien sa façon de voir.

Enfin Hermance se décide. — Joie générale. — Aparté d’Agénor : il est au désespoir du bien qui va résulter ; c’est peut-être lui qu’on va charger de l’opération, alors il se promet d’être le plus maladroit possible et de lui couper tout le bras avec sa lancette. — Mais ce ne sera pas lui. — S’il avait au moins à aller chercher le vaccin ! au lieu de vaccin il rapporterait le suc des plantes les plus vénéneuses, la bave des serpents, car, s’il pouvait, il inoculerait la peste au genre humain.

Hermance, Jenner et Ismène sortent pour l’opération, suivis d’Agénor qui va au moins aller repaître ses yeux d’un supplice, quelque léger qu’il soit ; c’est toujours beaucoup pour son âme altérée.

V

Le vieux guerrier reste seul. — Il sait voir la mort sur les champs de bataille, Bellone ne l’a jamais effrayé ; mais, quand il