Page:Gustave Flaubert - La Tentation de Saint-Antoine.djvu/134

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terre céleste ; et son tombeau le représentait égorgeant un monstre, — emblème du Bien qui extermine le Mal.

Car je devais un jour, grâce au temps sans bornes, vaincre définitivement Ahriman.

Mais l’intervalle entre nous deux disparaît ; la nuit monte ! À moi, les Amschaspands, les Izeds, les Ferouers ! Au secours Mithra ! prends ton épée ! Caosyac, qui dois revenir pour la délivrance universelle, défends-moi ! Comment ?… Personne !

Ah ! je meurs ! Ahriman, tu es le maître !

Hilarion, derrière Antoine, retient un cri de joie — et Ormuz plonge dans les ténèbres.
Alors paraît
la grande diane d’éphèse
noire avec des yeux d’émail, les coudes aux flancs, les avant-bras écartés, les mains ouvertes.
Des lions rampent sur ses épaules ; des fruits, des fleurs et des étoiles s’entre-croisent sur sa poitrine ; plus bas se développent trois rangées de mamelles ; et depuis le ventre jusqu’aux pieds, elle est prise dans une gaine étroite d’où s’élancent à mi-corps des taureaux, des cerfs, des griffons et des abeilles. — On l’aperçoit à la blanche lueur que fait un disque d’argent, rond comme la pleine lune, posé derrière sa tête.

Où est mon temple ?

Où sont mes amazones ?

Qu’ai-je donc… moi l’incorruptible, voilà qu’une défaillance me prend !

Ses fleurs se fanent. Ses fruits trop mûrs se détachent. Les lions, les taureaux penchent leur cou ; les cerfs bavent épuisés ; les abeilles, en bourdonnant, meurent par terre.