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absolu de la théorie réaliste ; aussi j’espère que cette œuvre, ou tout ce qu’il y a de plus élevé dans la doctrine se trouve mis en œuvre par un talent de premier ordre, rencontrera à meilleur escient, auprès de la masse du public, quelque chose de l’empressement qu’ont excité L’Assommoir et La Fille Élisa.


Le XIXe Siècle, 13 juin 1877 (Charles Bigot).

Il y a longtemps que M. Gustave Flaubert n’avait rien publié. Ce n’est pas un auteur qui se prodigue. En ce temps de littérature facile, c’est presque un phénomène que cet écrivain qui tous les six ou sept ans sort de son repos pour livrer au public un ouvrage longuement médité, exécuté avec patience, porté lentement par son auteur au degré qu’il considère comme la perfection.

L’événement n’a pas toujours répondu ni à l’effort dépensé ni à l’espérance générale. Il est d’honnêtes gens qui ne sont parvenus ni à rendre pleine justice à l’érudition pittoresque de Salammbô ni à bien comprendre l’Éducation sentimentale ou La Tentation de Saint Antoine. M. Flaubert a eu cette fois moins hautes ambitions. L’art de la mise en page aidant, il a fait un volume avec trois courtes nouvelles. Il l’a modestement intitulé : Trois Contes. Mais ces trois contes feront peut-être plus pour la gloire de l’auteur que n’auraient fait autant de longues œuvres. Encore en est-il un que j’abandonnerais volontiers aux critiques sévères. C’est le récit intitulé Hérodias, et qui retrace la mort de Iaokanann, plus connu des profanes sous le nom de saint Jean-Baptiste. Il y a là trop d’archéologie pour que le lecteur se sente fortement ému ; l’œuvre est étrange plus que vivante et humaine, et ce que j’en préfère, pour ma part, c’est certaine vue de Judée au soleil levant, découverte du haut de la terrasse du palais d’Hérode Antipas, qui est à coup sûr d’un grand paysagiste élève de Decamps. Le reste m’a laissé froid. Mais je ne saurais en revanche dire assez de bien des deux premiers récits du livre intitulés, l’un Un Cœur simple, l’autre La Légende de Saint Julien