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Page:Gustave Toudouze - Péri en mer, 1905.pdf/248

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IV

Comme la nuit noircissait encore sous ce ciel sans lune et sans étoiles, que l’épaisseur entassée des nuées couvrait d’un voile de deuil ininterrompu, l’animation s’accrut, sauta brusquement à un diapason de folie, où les cris, les chants, les jurons, les rires luttaient de violence avec le hurlement formidable de l’Océan remué jusqu’au fond de ses mystérieux abîmes.

Sur le quai de Camaret un fleuve de population coulait, plein de remous, de tourbillons, de courants se formant en sens opposé, se heurtant, une houle farouche et incessante, où les vagues étaient des poings lancés en l’air, où l’écume était la bave de bouches vociférant des injures, des chansons, où le vent terrible de l’ivresse soufflait son haleine embrasée, empoisonnée d’alcool.