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Page:Gustave Toudouze - Péri en mer, 1905.pdf/253

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Ce soir-là, perdus au milieu de la tourbe grouillante, leur journée terminée, ils firent comme d’habitude, sauf quelques-uns qui avaient des amis parmi les quelques pêcheurs raisonnables de Douarnenez, ou ceux qui profitaient de l’occasion pour faire également tapage, luttant d’ivrognerie avec ces Russes.

Tous les établissements étaient pleins à déborder ; les boulangeries, envahies d’abord, avaient été entièrement vidées, car acheter du pain est la première préoccupation des Douarnenéziens : dès qu’ils sont à terre, on les voit, un grand pain rond sous le bras, leur petit béret bleu plissé régulièrement, donnant à leur petite tête l’aspect d’un champignon haut perché sur leurs épaules massives et leurs grands corps.

Des groupes roulaient, titubant, l’œil voilé, la bouche pâteuse, du Débit Moal au Café Geay, de la Descente des Pêcheurs au Café du Nord, du Café du Port chez Bozannec À l’abri de la Tempête, passant par le Café de l’Espérance, l’Hôtel de la Marine, avant de pousser jusqu’au Café de la Rade, au fond du Styvel.

C’étaient bien là ces Douarnenéziens qui, ivrognes redoutables, dès qu’ils ont un peu d’argent, le dépensent en bonbons, en gâteaux, en vin, en alcool, en ripailles, robes de soie pour leur femme, bijoux, sucreries, puis atteignent la misère complète, à tout mettre au Mont-de-Piété,