Page:Guttinguer - Dernier Amour, 1852.djvu/21

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Dons ce monde d’ennuis, de regrets et de pleurs,
Je vais menant partout avec moi ta pensée,
Doux fardeau qui me suit comme un bouquet de fleurs
Dont j’aspire en marchant la divine rosée.
Sans ce rêve charmant, clarté de mon destin,
Je tomberais, je crois, fatigué de la vie,
Et je dirais : Assez, mon Dieu, de ce chemin
Où la ronce est partout, le doute amer, l’envie ;
Où l’orage nous suit et frappe à chaque pas
Les fleurs de nos jardins et celles de nos âmes,
Où la mort de ses traits perce jusqu’en nos bras
Tout ce que nous aimons : les enfants et les femmes.
Assez, j’ai trop vécu ! — Mais ton image est là,
Souriante à travers ces voiles et ces ombres,
Et je dis que demain elle me reviendra,
Jeter tous ses rayons dans ces routes si sombres,
Me montrer le ciel bleu sur les arbres fleuris,
Me porter sur son aile en me disant : Courage,
Me répéter ces mots, charme de nos esprits,
Et qu’ainsi je pourrai terminer mon voyage.
Alors, je le poursuis, en cherchant les chemins
Connus de notre amour, et jusqu’aux moindres places
Où je la vis marcher, où je trouvai ses mains
Pour rafraîchir mon front ; où je suivis ses traces,
Et j’attends que le sort, qu’on ne peut arrêter,
La jette dans mes bras pour ne plus l’en ôter.


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