Elle s’attendrissait à ces détails qui lui semblaient des révélations ; comme si elle fût entrée tout à coup dans toute la vie passée, secrète, la vie du cœur de petite mère. Elle regardait le corps gisant ; et, brusquement, elle se mit à lire tout haut, à lire pour la morte, comme pour la distraire, la consoler.
Et le cadavre immobile semblait heureux.
Une à une elle rejetait les lettres sur les pieds du lit ; et elle pensa qu’il faudrait les mettre dans le cercueil, comme on y dépose des fleurs.
Elle délia un autre paquet. C’était une écriture nouvelle. Elle commença : « Je ne peux plus me passer de tes caresses. Je t’aime à devenir fou. »
Rien de plus ; pas de nom.
Elle retourna le papier sans comprendre. L’adresse portait bien « Madame la baronne Le Perthuis des Vauds. »
Alors elle ouvrit la suivante : « Viens ce soir, dès qu’il sera sorti. Nous aurons une heure. Je t’adore. »
Dans une autre : « J’ai passé une nuit de délire à te désirer vainement. J’avais ton corps dans mes bras, ta bouche sous mes lèvres, tes yeux sous mes yeux. Et puis je me sentais des rages à me jeter par la fenêtre en songeant qu’à cette heure-là même, tu dormais à son côté, qu’il te possédait à son gré… ».
Jeanne, interdite, ne comprenait pas.
Qu’était-ce que cela ? À qui, pour qui, de qui ces paroles d’amour ?
Elle continua, retrouvant toujours des déclarations éperdues, des rendez-vous avec des recommandations de prudence, puis toujours, à la fin, ces quatre mots : « Surtout brûle cette lettre. »