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L’ÉDUCATION PHYSIQUE ET L’HÉRÉDITÉ.

honneur et en vigueur. Après avoir emprunté l’internat aux jésuites, on a eu le tort de ne pas leur emprunter également son correctif, qu’ils ont eu la sagesse de conserver. Les jeux et exercices du corps tenaient, en effet, une large place dans leurs collèges d’autrefois. Les écoles des jésuites sont presque les seules où les élèves jouent et courent encore comme dans le vieux temps. « Voilà, dit M. Legouvé, l’éducation que je voudrais emprunter aux révérends pères, l’éducation des jambes ».

Malheureusement, on a beau dire aux enfants déjouer, à quoi voulez-vous qu’ils jouent quand vous les lâchez dans des préaux qui seraient trop étroits pour le sixième d’entre eux ? M. Dupanloup rapporte cette parole qui lui fut dite un jour par ses élèves : « Si vous saviez, monsieur le supérieur, comme ça nous ennuie de nous amuser de la sorte ! » Les choses sont pourtant ainsi : on en arrive à imposer un jeu et à donner des pensums, des punitions aux enfants qui n’y prennent pas part ou n’y apportent pas assez d’entrain. Ce qui est, à coup sur, très ingénieux. Alors pour éviter les châtiments immérités, les enfants apprennent l’hypocrisie et font semblant de jouer jusqu’à ce que le surveillant ait de nouveau le dos tourné et qu’ils puissent reprendre la conversation interrompue.

La gymnastique au lycée a lieu pendant les récréations, et, comme il y a beaucoup d’élèves pour le même trapèze, chaque élève ne fait guère plus d’une culbute par jour, moins le jeudi et le dimanche. « Pourquoi donc, demande avec raison M. de Coubertin, le gymnase n’est-il pas toujours ouvert, avec faculté pour les écoliers d’exercer leurs biceps toutes les fois que bon leur semble ? »

En été, il y a la gymnastique des bains froids, qui dure deux mois de l’année : le reste du temps, on ne se lave pas. Un collège a une piscine : c’est le lycée de Vanves, organisé d’ailleurs avec un soin tout spécial. Malheureusement la piscine, n’étant pas couverte, ne sert pas l’hiver. Un simple rapprochement : à Harrow, dit M. de Coubertin, chaque élève (ils sont cinq cents) paye environ 12 francs par an pour l’entretien de la piscine ; ce n’est pas cher.

Pour revenir à l’exercice par excellence, aux jeux, dans les rares occasions où on a vu des collégiens français laissés libres de se grouper pour un jeu quelconque, on a toujours remarqué l’ardeur qu’ils y apportaient.

Ce qui manque donc à nos collégiens ce n’est pas l’en-