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FOND ACTIF DE LA NOTION DE TEMPS

et l’espace s’ouvre devant nous, l’espace que des yeux immobiles ne pourraient saisir avec la succession de ses plans et la multiplicité de ses dimensions. De même pour le temps : il faut désirer, il faut vouloir, il faut étendre la main et marcher pour créer l’avenir. L’avenir n’est pas ce qui vient vers nous, mais ce vers quoi nous allons.

A l’origine, le cours du temps n’est donc que la distinction du voulu et du possédé, qui elle-même se réduit à l’intention suivie d’un sentiment de satisfaction. L’intention, avec l’effort qui l’accompagne, est le premier germe des idées vulgaires de cause efficiente et de cause finale. C’est par une série d’abstractions scientifiques qu’on arrive à leur substituer les idées de succession constante, d’antécédent et de conséquent invariable, de déterminisme te de mécanisme régulier. A l’origine, les idées de cause et de fin ont un caractère d’anthropomorphisme ou, si l’on veut, de fétichisme : elles sont le transport hors de nous de la force musculaire (cause efficiente) et de l’intention (cause finale). Ces notions métaphysiques ont à l’origine une signification non seulement tout humaine, mais tout animale, car le besoin à satisfaire et l’innervation motrice sont les expressions de la vie dans tout animal. C’est