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CHAPITRE IV


LA PIÉTÉ ÉPICURIENNE. — LUTTE CONTRE LA DIVINITÉ CONÇUE COMME CAUSE EFFICIENTE.


I. — Que le monde n’a ni cause première, ni cause finale. L’argument tiré de l’existence du mal employé avec une grande force par les Epicuriens.
II. — Comment, de l’absence de toute cause agissant sur le monde, on ne peut pas conclure l’athéisme, suivant Epicure. Fait universel dont il faut tenir compte : la croyance à des dieux immortels et bienheureux. Que cette croyance doit avoir elle-même son fondement dans quelque fait d’expérience. De nos représentations des dieux. — Qu’il y a dans ces représentations une part de vérité, et qu’il faut seulement la purifier des éléments étrangers qui s’y sont associés. — Que l’idée d’une divinité créatrice ou ordonnatrice du monde, n’est pas primitive ; qu’elle est dérivée et inexacte. — Tentative d’Epicure pour revenir à la notion primitive. — Que les dieux sont bienheureux, conséquemment inactifs, car l’action suppose l’effort et la peine ; qu’ils sont invisibles pour nos yeux ; qu’ils sont en nombre infini, etc. Logique de la doctrine d’Epicure, qui déduit jusqu’au bout les conséquences de principes inexacts.
III. — Le culte des dieux selon Epicure. — Epicure au temple de Jupiter. — Pourquoi les Epicuriens révéraient leurs dieux. — Conséquence remarquable à laquelle aboutit le système épicurien : que de toutes les vertus, la piété seule est désintéressée.
IV. — La théologie d’Epicure est-elle sincère ? — Opinion d’un historien contemporain sur la doctrine d’Epicure. Honorait-il la divinité comme un simple idéal ou comme une réalité et faut-il assimiler sa doctrine à celle de MM. Vacherot et Renan ? — Qu’au contraire, les dieux d’Epicure étaient pour lui des êtres très réels. — Identification du subjectif et de l’objectif, de l’idéal et de la réalité, sur laquelle repose au fond la doctrine d’Epicure.


I. — La morale d’Epicure, nous l’avons vu, est absolument indépendante de toute idée religieuse. De même la cosmologie épicurienne ne fait appel à aucune intervention divine. Le système d’Epicure en son ensemble rejette toute idée de cause première et de cause finale.

Pour montrer qu’en effet le monde existe sans l’aide de la divinité, Epicure a invoqué l’un des premiers l’argument dont les modernes tireront un si grand parti,