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Page:Guyon - Histoire d’un annexé (souvenirs de 1870-1871).djvu/27

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étaient arrivés à Pont-à-Mousson, au nombre de trente ou quarante. Après avoir échangé quelques coups de feu avec des soldats français et des habitants, les dragons allèrent à la gare et se mirent à briser la voie, pour couper toute communication aux trains qui allaient à Metz. Les hussards gardaient la route.

Tout à coup, rapide comme la foudre, arrive un détachement de chasseurs d’Afrique, par la route de Metz. Leurs petits chevaux arabes semblaient voler.

Ils s’élancent sur les Prussiens qu’ils tuent ou dispersent. Une course folle s’engage dans la ville : les hussards allemands s’enfuyaient partout, poursuivis le sabre dans les reins, et beaucoup furent tués ou faits prisonniers.

C’est ce que me raconta fièrement un habitant de la ville, qui fit route avec moi pendant quelque temps.

Enfin n’espérant plus trouver ni nourriture ni logement dans la ville, j’allais remettre mon sac sur l’épaule et chercher dans un village voisin quelque auberge plus hospitalière, lorsque je me rappelai que mon père m’avait parlé autrefois d’un vieux professeur de musique, à qui il avait rendu quelque service dans le temps.

Le nom de M. Bürger me revint à la mémoire. Je résolus aussitôt de lui rendre visite, espérant sinon trouver un asile, du moins avoir des renseignements qui pussent me tirer d’embarras.

Décidé à le voir, je m’adressai au premier marchand qui se trouvait sur sa porte :

« Connaissez-vous M. Bürger, ancien professeur de musique ?

— Non, monsieur. »

Telle fut la réponse que je reçus de plusieurs personnes auxquelles je m’adressai, ce qui me fit penser que l’ancien artiste avait perdu beaucoup de la célébrité dont mon père m’avait parlé.