Page:Guyot - L'Inventeur.djvu/12

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et cependant le Français, peut-être plus que tout autre, est remuant, actif, entreprenant. Pourquoi donc se condamne-t-il le plus souvent à végéter dans un bureau, à pourrir dans une administration, et n’a-t-il d’autre but que de se nourrir à l’auge du budget, au lieu d’aller, comme l’Anglais, chercher au loin la richesse quand il ne la trouve pas auprès de lui, ou de se lancer dans les gigantesques et aventureuses entreprises dans lesquelles l’Américain trouve si souvent une fortune inespérée ? Ah ! c’est que nous manquons de liberté ; c’est que nous sommes habitués à ne marcher que soutenus par les lisières de l’autorité ; c’est que nous invoquons sans cesse, et à propos de tout, l’État comme notre ange tutélaire, parce qu’il nous a forcés, depuis Napoléon, à ne pouvoir rien faire sans lui. Nous voudrions voir disparaître cette funeste tendance. Il faut que le souffle chaud et puissant qui animait nos pères sous la Révolution et leur faisait faire tant de prodiges, remplisse encore nos poumons, si nous ne voulons pas nous laisser dépasser par les peuples qui nous entourent et qui déjà, sous bien des rapports, nous sont supérieurs, quoi que puissent dire les chauvins. Et pourquoi nous dépassent-ils ? pourquoi serons-nous bientôt réduits à nous traîner à leur remorque, si ce n’est parce que l’industrie prend chez eux des proportions colossales qu’elle n’atteint nullement chez nous ? N’est-ce pas elle qui fait la supériorité de l’Angleterre et de l’Amérique ? Car elle est maintenant la seule puissance ; les autres sont passées au second rang ; ce n’est plus l’épée qui fait la grandeur d’un peuple, c’est la machine.

Ce n’est que d’hier qu’elle est née et que d’hier que