Page:Guyot - L'Inventeur.djvu/187

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ville se filtre dans l’espace de quelques minutes par une aiguille grosse comme le doigt ou par un fil de métal qui servirait à la prolonger ! À quiconque aurait assez de crédulité pour se prêter à une pareille idée, ne pourrait-on pas aussi dire d’ajuster de petits tubes le long des torrents pour prévenir les désordres de l’inondation ? S’il ne fallait que des corps pointus ou éminents pour nous garantir des coups de tonnerre, les flèches des clochers ne suffiraient-elles pas pour nous procurer cet avantage ? car, outre que la plupart ont une croix dont les bras sont presque toujours terminés en pointe, ce que l’on met au bout est si peu de chose, par rapport à la grandeur des objets, que ces édifices sont plus pointus vis à vis un nuage, qu’une aiguille a coudre ne peut l’être a l’égard d une barre électrisée. Cependant on sait de tout temps que la foudre ne les i éjecte guère, non plus que la cime la plus aiguë des montagnes, feriunt... summos fulmina montes. »

Et voilà cependant par quels arguments, dont il est inutile de démontrer la fausseté aujourd’hui, il engageait la plupart des physiciens français à combattre le paratonnerre. Quelques-uns même dépassèrent son ardeur belliqueuse : lui se contentait d’appeler le paratonnerre un petit écart de M. Franklin, fort à déplorer. Un de ses disciples, l’abbé Poncelet, voulait qu’un règlement de police défendit de terminer les édifices en pointe, et ordonnât de leur donner des surfaces convexes ; bien plus encore, on devait, dans un intérêt public, interdire de planter des arbres de haute tige auprès des habitations. Il reprend pour motiver son ardeur les arguments de l’abbé Nollet, en essayant de les rendre plus forts par les hyperboles avec lesquelles il les couvre.

Essayer d’éviter les accidents du tonnerre avec une petite barre de fer, « c’est comme si, disait-il, je voyais un charlatan, muni d’un vase contenant environ une pinte, entreprendre dévider l’immense bassin de l’Océan, pour passer à pied sec eu Angleterre. »