Page:Guyot - L'Inventeur.djvu/235

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« On n’en tint pas compte et Garus fut mandé. Il ne répondit de rien, car, disait-il, on l’avait fait venir trop tard. Cependant, sur les instances du régent, on administra son élixir qui fit merveille ; il doubla la dose et la guérison parut à peu près assurée. Chirac, cependant, qui était le médecin ordinaire, remuait ciel et terre pour être rappelé ; il y parvint, et une nuit pendant que Garus dormait sur un canapé, dans une chambre voisine de celle de la princesse, il se glissa près d’elle et lui présenta un julep de sa façon. C’était un affreux purgatif qui la tua.

« La princesse était morte, mais la forme était sauvée. Ne vaut-il pas mieux mourir avec la permission de la Faculté qu’avoir l’audace de s’en passer pour guérir !

« Ajoutons qu’aujourd’hui l’élixir de Garus est recommandé par tous les médecins, »

Et que de remèdes ont eu le même sorti Ils sont d’abord rejetés par les médecins, comme d’infâmes poisons : puis ils font malgré tout leur chemin peu à peu, quoique obligés de se cacher, quoique ne pouvant guérir au grand jour.

Et n’est-ce pas de même qu’a dû, jusqu’à ce jour, agir toute vérité. Les pamphlets du dix-huitième siècle n’étaient-ils pas aussi, eux, imprimés sournoisement dans les caves, et distribués la nuit, en cachette ? C’est l’histoire de tout le progrès.

Nous avons déjà vu qu’au dix-septième siècle, la Faculté traitait l’émétique d’hérétique. Le mercure fut de même repoussé par tous les médecins du seizième siècle, et au dix-huitième la vaccine était unanimement condamnée. Il fallut près de trois cents ans au quinquina pour être adopté par les savants, et encore n’eut-il le bonheur de trouver place dans le codex que, parce que Louis XIV, atteint d’une fièvre intermittente qui faisait perdre leur latin aux docteurs, voulut bien se livrer à un charlatan qui lui administra la poudre d’Amérique et le guérit, malgré les clameurs de la Faculté. La lithotritie a trouvé un adversaire