Page:Guyot - L'Inventeur.djvu/308

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que cet homme qui a travaillé, qui a souffert, qui a créé, ne profite pas de son œuvre, au moins pendant un certain temps.

Eh bien ! non, toute transaction est honteuse; si vous ne croyez pas que l’inventeur ait un droit, abandonnez-le, laissez-le crever de misère dans quelque coin quand il aura produit son œuvre qui apportera des millions à la société. Mais ne lui faites pas l’aumône d’un privilège. Tout ou rien ! Cessez d’être timides, n’ayez pas peur, condamnez l’inventeur avec lord Grandville, ou proclamez son droit de propriété en lui accordant toutes les conséquences qui en dérivent !

Et vous êtes forcés par la nature des choses d’en arriver là, ou bien vous vous rendrez coupables du plus éclatant déni de justice qui ait jamais été commis, car l’inventeur possède ce droit par essence, car c’est avec raison que Mirabeau s’est écrié : « Les découvertes des inventions et des arts étaient une propriété avant que l’Assemblée nationale l’eût déclaré ! »

Nous pouvons dire nous aussi : Si vous n’accordez qu’un privilège à l’inventeur, l’inventeur n’en est pas moins propriétaire de droit si ce n’est de fait.

L’invention est une propriété, disons-nous, et vous devez l’admettre à moins que vous ne niiez toute espèce de propriété et que vous ne disiez avec Proudhon : « La propriété c’est le vol I »

Oui ou non, le travail peut-il engendrer la propriété ? voilà la première question à résoudre.

« La propriété, disait la déclaration des droits et des devoirs qui précédait la constitution de l’an III, est le droit de jouir et de disposer de ses biens, de ses revenus, du fruit de son travail et de son industrie. »

Il y a une école d’économistes qui soutient le contraire; elle prétend que le travail est insuffisant pour engendrer la propriété; MM. Frédéric Passy et Victor Modeste, quoique