Page:Guyot - L'Inventeur.djvu/44

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solus et immuables. Ce n’est pas le système protectioniste qui empêchera notre industrie d’être en souffrance, non plus que les autres lois, décrets ou règlements du même genre. Pour créer la richesse sociale, il n’y a qu’un moyen : c’est d’empêcher toute force de se perdre. Malheureusement, jusqu’à ce jour, la plupart des gouvernements n’ont pas voulu comprendre cette vérité si simple : ils font venir du guano du Pérou à grands frais, ils donnent des privilèges aux navires qui l’apportent, mais ils se gardent bien d’utiliser tout l’engrais qui s’échappe par les égouts de nos villes, va empoisonner nos fleuves et se perdre dans la mer. Lisez les admirables pages de Victor Hugo sur ce sujet. Si l’engrais est le plus puissant moyen de culture, si Olivier de Serres a dit : « En agriculture, que faut-il ? de l’engrais, toujours de l’engrais et encore de l’engrais ! » il n’est pas moins vrai qu’avant tout, pour qu’un peuple soit grand, il faut des hommes.

Des hommes ! des hommes ! voilà ce que nous demandons. Je ne désire pas, en poussant ce cri, une grande augmentation de la population ; je prends le chiffre d’hommes que nous possédons, et je pose alors cette question : « Ces hommes emploient-ils toutes les forces dont la nature a doué chacun d’eux ? »

Eh bien ! non évidemment. Sur dix millions d’hommes, il n’y en pas dix mille qui usent de toute leur énergie et de toute leur intelligence. Quelle terreur ne doit pas inspirer à l’homme qui pense et à l’homme qui calcule cette immense perte de richesses naturelles ? La société actuelle est une machine à vapeur dont le foyer est disposé de telle sorte, que le combustible employé ne produit pas un pour cent d’effet utile. Quel est le mécanicien qui ne condamnerait pas une semblable machine ? Pourtant notre ordre social actuel n’est pas meilleur, et il se trouve des gens qui se vantent, qui sont contents du statu quo, qui ne veulent pas qu’on y touche, qui poussent des rugissements de co-