Page:Guyot - L'Inventeur.djvu/460

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quante pour cent à mes créanciers ; mais il se trouva que mon actif ne me fournissait pas vingt pour cent.

« — Ah ! mon Dieu, mon père !

« — Sais-tu ce que je fis ?

« — Je ne puis le deviner, mon père.

« — Je comblai la différence de mes propres deniers, et mes créanciers furent payés de leur cinquante pour cent comme d’habitude... d’un autre côté, quand le hasard, ce capricieux génie, m’a conduit plus tard à contrefaire, dans ma fabrique, un objet breveté, toutes les fois que l’inventeur, soutenant jusqu’au bout ses droits, a obtenu des tribunaux une condamnation contre moi, j’ai courbé la tête et j’ai payé les dommages-intérêts.

— Ah ! mon père, votre conduite est bien noble ! »

Est-il assez curieux ce type de contrefacteur ? Quel honnête homme ? mais il vit, il est bien portant, il se trouve partout ; c’est lui qui en Amérique contrefait l’invention de Fulton et cause la mort de l’inventeur ; c’est lui qui fait mourir Jouffroy aux Invalides ; c’est lui qui vole la peigneuse de Heilmann exposée à Paris en 1849 et qu’il expose en 1851 à Londres ; c’est lui qui pousse Jobard à cacher la méthode à l’aide de laquelle il parvenait à extraire du gaz à éclairage de l’eau ; c’est lui qui contrefait le cherche-fuites Maccaud ; c’est lui qui s’empare, à sa naissance, du mode de coulage des glaces de M. Brossette ; c’est lui qui gagne des millions, en usant du procédé d’Edouard Adam pour la distillation des alcools, et tue l’inventeur en le traînant de procès en procès.

S’il vit, c’est que la loi le protège. Certes, je ne voudrais pas demander contre lui la peine de mort. Je suis ennemi des lois draconiennes, mais cependant je dois dire que notre, loi le favorise singulièrement. Il y aurait certes une curieuse étude à faire sous ce titre : De la protection que la loi accorde au contrefacteur.

Sans faire cette étude, montrons que la pérennité de la