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l’éducation administrative qu’ils ont infiltrée dans l’esprit et dans le caractère français.

Car voici le résultat qu’amène chez le peuple le plus indépendant du monde la consécration de cet enseignement par l’autorité : Le père voit que tous les parents font recevoir leurs fils bacheliers ; il s’empresse de faire à son tour recevoir son fils bachelier. Pourquoi ? parce que tout le monde le fait, parce que le baccalauréat est une affaire de bon genre. Un chapelier dont le fils doit faire des chapeaux fera recevoir, son fils bachelier, s’il est à l’aise ; un agriculteur dont le fils doit cultiver la terre fera recevoir son fils bachelier, s’il en a le moyen. Un peu de latin ne fait pas de mal, dit-il ; cela pose un homme, ça développe son intelligence. Et tous les moutons de Panurge se suivent l’un l’autre, condamnant leurs fils à passer tous dans le même moule.

Et vous voulez que votre industrie soit prospère ! et vous voulez que le monde marche ! et vous prétendez que vous êtes les apôtres du progrès !…

Commencez donc par faire des hommes du présent afin qu’ils soient les hommes de l’avenir, au lieu d’être les hommes du passé !

III

Voilà donc l’éducation que donne le lycée aux jeunes gens. Quand ils en sont sortis, quel enseignement trouvent-ils ? un seul et unique, celui du gouvernement. Pourquoi le gouvernement garde-t-il ainsi l’enseignement supérieur ? voici la réponse que fait un homme qui y occupe une chaire, M. Edouard Laboulaye : « Il n’y a aucune raison scientifique qui puisse autoriser l’État à garder pour lui l’enseignement des lettres, des sciences,