Page:Guyot - Les principes de 89 et le socialisme.djvu/271

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Le compagnon. — Ah ! mais moi, j’avais compris que si je ne travaillais plus pour cet infâme luxe, j’en jouirais : et au lieu de bagues aux doigts, tu m’offres des ampoules. Merci bien.

Millerand. — C’est la règle.

Le compagnon. — Et si je travaille, aurais-je mon cigare et une bouteille de vin ?

Millerand. — Ça dépendra du répartiteur.

Le compagnon. — Mais, au moins, autrefois de l’argent que j’avais gagné, je faisais ce que je voulais.

Millerand. — Maintenant, il n’y a plus d’argent. Tu as le devoir d’obéir aux ordres que je te donne, au nom de la Société.

Le compagnon. — Ah ! c’est comme ça, traître ! Renégat ! tu nous as trompés ! je me doutais bien que tu n’étais qu’un faux socialiste, espèce de bourgeois ! Prends donc ma pioche à ma place ; moi, je vais prendre mon fusil. Ce n’est pas ça, la vraie Révolution sociale ! je vais aller y travailler.


III. — En attendant ce règne du bonheur, ce que les socialistes réclament tous les jours, avec les protectionnistes, du reste, c’est que la puissance, l’énergie, la capacité des meilleurs, soient mises au service des plus déprimés moralement, intellectuellement et physiquement ; mais alors, l’État surchargera et écrasera les plus forts au profit des moins forts. Il ne fortifiera pas ces derniers qui, comptant sur lui, au lieu de redoubler d’énergie, s’atrophieront dans leur apathie. Il affaiblira les premiers, et réduira tous les citoyens à une égale impuissance misérable qui en fera la proie