Page:Guyot Desfontaines - La Voltairomanie.djvu/32

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Car l’Officier arrêtant le Poëte par le bras, J’ai toujours oüi dire que les impudens étoient lâches, lui dit-il, j’en veux faire l'épreuve, & ne puis mieux m’adreſſer qu’à vous. Voïons, Monſieur le bel eſprit, ſi vous vous ſervirez bien de cette épée que vous portez, je ne ſçai pourquoi ; ou préparez-vous à recevoir de cette canne le châtiment de votre inſolence. Telle qu’une Catin pâlit & s’effraïe aux éclats redoublés du tonnerre, tel le Poëte pâlit au diſcours de l’Officier, & la frayeur lui inſpirant avec le repentir des ſentiments d’humilité & de prudence : »

J’ai péché, lui dit-il, & je ne prétends pas
Emploïer ma valeur à défendre mes fautes,
J’offre mon échine & mes côtes
Au juſte châtiment que prépare ton bras
Frape, ne me crains point, frape, je te pardonne,
Ma vie eſt peu de choſe, & je te l’abandonne.
Tu vois en ce moment un Poëte éperdu,
Digne d’être puni, content d’être battu,
N’oppoſer nul effort à ta valeur ſuprême.
Beauregard n’aura point de vainqueur que lui-même.

« Ces beaux diſcours ne ſservent ici de rien, dit l’Officier, défendez-vous, ou prenez garde à vos épaules. Le Poëte n’ayant pas la hardieſſe de ſe défendre, l’Officier le chargea de quantité de