Page:Guyou, Mottez - Théorie du navire, suivi de Traité des évolutions et allures, 1887.djvu/397

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

l’action des voiles virera presque aussi rapidement et dans un bien moindre espace, si, pendant qu’on cargue la grand’voile et la brigantine, on gouverne en ralingue ; car il arrivera pour ce bâtiment que l’erre sera cassée quand on commencera à le faire tourner ; naturellement très sensible aux couples d’évolution des voiles, il le sera d’autant plus qu’il aura moins de vitesse. Un bâtiment court qui vient de perdre son erre comme nous l’avons dit, qui retombe faute d’erre, qui se trouve alors sollicité par tout le phare de l’avant et les focs bordés plats, et dont les voiles de l’arrière sont avec grande attention conservées en ralingue, acquiert un mouvement de rotation tellement rapide, que la manœuvre en est saisissante d’intérêt.

Si, au contraire, on a à manœuvrer un bâtiment long qui tourne lentement, il se pourrait qu’il fût obligé, pour évoluer, de reprendre la vitesse qu’il aurait perdue, car ces bâtiments obéissent plus à leur barre qu’à leurs voiles. En ce cas, on aurait perdu du temps et l’on ferait probablement un tour plus grand en manœuvrant comme le bâtiment court qu’en virant de bord avec la barre en conservant les voiles orientées pour le vent pendant tout le cours de l’évolution. C’est au manœuvrier qui connaît son bâtiment qu’il appartient de décider cette question. A première vue, il semblerait que le couple d’évolution des voiles de l’avant dût avoir plus d’action sur un bâtiment long que sur un bâtiment court ; mais si l’on y regarde de près, on verra que le centre de gravité des voiles de l’avant, en y comprenant les focs, se trouve sur une verticale passant par l’étrave pour les bâtiments courts et sur une verticale passant à 10 ou 12 mètres en arrière de l’étrave sur les bâtiments longs. Or, même dans le cas où le mât de misaine occuperait la même position par rapport à l’étrave, le bâtiment long tournerait moins vite par la raison que l’impulsion du couple n’aurait crû sur le bâtiment long que comme la longueur, tandis que la résistance au mouvement de rotation de chaque élément du plan longitudinal immergé aurait crû comme le cube de la longueur ;