Page:Gyp - Bijou, Calmann-Levy, 1896.djvu/20

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ça très suffisant… elle fait — on dit toujours ça, mais, cette fois, c’est vrai — ses robes elle-même… elle est industrieuse et adroite… elle s’entend à merveille à tenir une maison, c’est elle qui, depuis quatre ans, dirige tout ici et à Paris… mais c’est moi qui ne pourrais pas me faire à l’idée de lui voir une existence médiocre… et elle l’aurait en plein !… Pourvu, mon Dieu ! qu’elle n’aille pas se mettre à aimer Jean !…

— Oh !… je ne pense pas !…

— C’est qu’il est charmant, l’animal !… et, paraît-il, très aimé ?…

— Très !… mais Bijou est si adulée, si entourée, si adorée, qu’elle n’a pas beaucoup le loisir d’aimer elle-même !…

— Et puis, elle est si enfant !…

Et la marquise regarda sa petite-fille avec une infinie tendresse.

Debout près du billard, Bijou observait la partie, et taquinait en riant les joueurs. À quelques pas d’elle, le jeune professeur immobile la contemplait l’œil extasié. Tout à coup, Jean de Blaye se leva brusquement, l’air agacé, et se dirigea vers la porte qui conduisait au perron.

— Attends !… — cria Denyse, — attends que je te donne une rose !…

Elle s’approcha de la corbeille, et y prit une rose jaune, à peine entr’ouverte, qu’elle vint passer à la boutonnière de son cousin.

— Là !… — fit-elle en reculant, l’air heureux, — tu es très beau comme ça !…