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ix
PRÉFACE

ou plutôt dans la nuit qui suivit, il arriva une chose curieuse. Le Secrétaire particulier, qui dans la vie privée s’appelait tout simplement Jean Grébault, fut réveillé vers minuit par un bruit insolite. Il avait laissé sa fenêtre ouverte en s’endormant et vit qu’un clair de lune splendide inondait de lumière une partie de la chambre ; une forme étrange se dessinait en bloc sombre sous la clarté, et, regardant avec plus d’attention, il s’aperçut que c’était le chien, qui, debout, deux pattes posées sur l’appui, le considérait sans bouger. Il eut un éclat de rire contenu et appela à voix basse : « Jérôme ! » Et Jérôme, franchissant la croisée d’un saut, vint s’asseoir au pied de son lit.

Après cela, il lui fut impossible de dormir. C’était une belle nuit de printemps, tiède et claire, et, par la fenêtre grande ouverte entraient, pour peu qu’on prêtât l’oreille, toutes sortes de bruits confus : cris lointains d’oiseaux nocturnes, bruissement des feuilles sous le vent, craquements dans les fourrés ; les mille frémissements de la vie mystérieuse qui, la nuit venue, s’agite dans les taillis sombres et au revers des fossés. Il sortit de son lit et s’avança jusqu’à sa fenêtre. L’étroit jardin dormait au clair de lune, figé dans ses alignements mesquins ; mais, au delà, la lumière pâle semblait avoir transformé le monde en un décor de féerie ; elle faisait danser sur le sol l’ombre découpée des feuillages, illuminait un bouquet de hêtres, changeait en opale une mare minuscule, sertie de roseaux, d’où montaient des appels de grenouilles.

Alors, il lui vint un grand désir d’être au milieu de tout cela ; de ne pas rester enfermé entre des murailles, à côté de la splendeur d’une telle nuit, et, revenant