Page:Hémon - Maria Chapdelaine, 1916.djvu/219

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— J’y crois point à vos remèdes, répondit-elle entre deux plaintes.

Mais elle regarda pourtant avec intérêt les pilules grises qui roulaient sans cesse dans la boîte de fer-blanc, comme si elles eussent été animées d’une vie surnaturelle.

— Mon frère en a mangé, voilà trois ans passés, quand il avait le mal de rognons si fort qu’il ne pouvait quasiment pas travailler, et il dit que ça lui a fait du bien. Oh ! c’est un bon remède, madame Chapdelaine, certain !

À mesure qu’il parlait, son hésitation primitive s’évanouissait, et il se sentait envahi d’une grande confiance.

— Ça va vous guérir, madame Chapdelaine, sûr comme il y a un bon Dieu. C’est un remède de première classe : mon frère l’a fait venir des États exprès. Vous ne trouveriez pas un remède comme ça au magasin de la Pipe, sûrement.

— Ça ne peut pas la rendre pire ? interrogea Maria avec un reste de crainte. Ça n’est pas du poison ni une affaire de même ?

Tous les hommes protestèrent ensemble avec une sorte d’indignation.

— Faire du mal, des petites pilules pas plus grosses que ça !

— Mon frère en a mangé quasiment une boîte, et il dit que c’est du bien que ça lui a fait.

Quand Eutrope partit, il laissa les pilules