Page:Hémon - Maria Chapdelaine, 1916.djvu/245

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— Le temps est doux à soir ; il va mouiller bientôt. Tout le monde dit que le printemps viendra de bonne heure.

Pour les paysans, tout ce qui touche à la terre qui les nourrit, et aussi aux saisons qui tour à tour assoupissent et réveillent la terre, est si important qu’on peut en parler même à côté de la mort sans profanation. Tous dirigèrent instinctivement leurs regards vers la petite fenêtre carrée ; mais la nuit était obscure et ils ne pouvaient rien voir.

Éphrem Surprenant fit de nouveau l’éloge de la morte.

— Dans toute la paroisse il n’y avait pas de femme plus vaillante qu’elle, ni plus capable. Accueillante, avec ça, et quelle belle façon elle avait pour les visiteurs ! Dans les vieilles paroisses et même dans les villes, où les « chars » passent, on n’en aurait pas trouvé beaucoup qui la valaient. Oui, tu étais bien gréé de femme, certain…

Il se leva bientôt, et sortit d’un air attristé.

Dans le long silence qui suivit le père Chapdelaine laissa sa tête retomber peu à peu sur sa poitrine et parut s’assoupir. Maria éleva la voix, craignant un sacrilège.

— Endormez-vous point, son père.

— Non… Non…

Il se redressa sur sa chaise et carra les