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Est-ce que le mal et le malheur ne sont pas partout, parce que l’inégalité, fille de classifications insensées, est partout ? Ah ! qui nous délivrera donc, de notre déraison !

Classons les animaux, les végétaux, les minéraux, si nous voulons ! nos erreurs n’ont aucune influence sur eux et ne peuvent les troubler ; mais respectons l’espèce humaine qui échapperait à toute classification, lors même que ce procédé serait raisonnable, parce que chaque être humain est mobile, progressif, et diffère bien plus de ses semblables, que l’animal le plus élevé ne diffère des siens.

Laissons donc chacun faire sa propre loi d’autonomie, se manifester selon sa nature, et veillons seulement à ce que le droit soit égal pour tous ; à ce que le fort n’opprime pas le faible ; à ce que toute fonction soit confiée à celui qui prouve être le plus apte à la remplir : voilà tout ce que nous pouvons, tout ce que nous devons faire, si nous tenons à nous montrer sages et justes.

L’harmonie existe dans la nature, parce que chaque être y suit paisiblement les lois qui régissent son individualité : il en sera de même dans l’humanité, lorsque la raison collective comprendra que l’ordre humain est préétabli dans le concours des facultés individuelles laissées libres dans leurs manifestations ; et que c’est retarder l’avènement de l’ordre, de la paix et du bonheur que d’établir un ordre factice, tout de fantaisie : c’est à dire un véritable désordre.

Gardons-nous donc de toute classification des facultés et des fonctions selon les sexes : outre qu’elle serait fausse, elle nous conduirait à la cruauté ; car nous opprimerions ceux et