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— Non mon fils, le séducteur n’est pas puni par la loi.

— Eh ! bien je le tuerais : car je rentre dans mon droit de justicier, quand la loi n’a pas pourvu.

— Bien, mon enfant. Ainsi tu ne seras à l’égard d’aucune jeune fille ni pervers ni lâche ; tu ne mériteras pas de subir l’arrêt que tu as prononcé, c’est à dire d’être tué. Tu respecteras donc toutes les jeunes filles comme tu veux qu’on respecte ta sœur, comme tu voudrais qu’on respectât ta fille.

Autre question : que penserais-tu d’un homme qui m’aurait entraînée à trahir ton père ; lui aurait enlevé mon cœur et mes soins ; m’aurait détournée des graves devoirs de la maternité ? Que penserais-tu de celui qui se conduirait ainsi à l’égard de ta propre compagne ?

— Je le jugerais comme l’autre et ne le traiterais pas mieux.

— Bien encore. Ainsi donc tu respecteras toutes les femmes mariées comme tu veux qu’on respecte ta mère et ta femme ; et si tu en rencontres quelqu’une pour laquelle tu te sentes de l’inclination, quelqu’autre assez déloyale pour chercher à te plaire, tu les fuiras : car le seul remède contre la passion, c’est la fuite.

Une multitude de femmes, d’abord innocentes, ont été détournées de la droite voie par des hommes qui ne pensent pas comme toi. Aujourd’hui elles se vengent sur ton sexe du mal qu’il leur a fait. Elles corrompent et ruinent les hommes qui, dans leur compagnie, perdent le sens moral, apprennent à rire de ce que tu crois et vénères, compromettent et perdent leur santé. Te sens-tu le triste courage de t’exposer à de semblables risques ?