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Lorsqu’il s’agit de vous, vous admettez bien que le droit de remplir toute fonction ne suppose ni la faculté ni la volonté d’en user ; pourquoi ne raisonnez-vous pas de même lorsqu’il est question de nous ? Que penseriez-vous des femmes si, ayant vos droits et vous le servage, elles vous tenaient dans une position inférieure sous le prétexte que vous ne pouvez pas accomplir la grande fonction de la gestation et de l’allaitement ?

L’homme, diraient-elles, ne pouvant être mère et nourrice, n’aura pas le droit d’être instruit comme nous, d’avoir comme nous une dignité civile. Son tempérament grossier le rend incapable d’être témoin dans un acte de naissance et de mort ; il est évident que sa maladresse l’exclut juridiquement des fonctions diplomatiques ; donc nous ne pouvons lui reconnaître le Droit de les briguer, etc.

Eh ! bien, Messieurs, vous raisonnez de la même manière, en excluant la femme de l’égalité sous le prétexte, qu’en général, elle est d’un tempérament moins fort que le vôtre : c’est à dire que vous raisonnez d’une manière absurde.

5° La femme ne peut être l’égale de l’homme en Droit parce qu’il la protège et la nourrit.

Si c’est parce que vous nous protégez et nous nourrissez, que nous ne devons pas avoir notre Droit, Messieurs, rendez donc leur Droit aux filles majeures et aux veuves que vous ne nourrissez ni ne protégez.

Rendez donc leur Droit aux épouses qui n’ont nul besoin de votre protection, puisque la loi les protège, même contre vous ; aux épouses que vous ne nourrissez pas, puisqu’elles vous apportent soit une dot soit une profession, soit des services