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Toute promesse de mariage est nulle.

Tout enfant naturel reste à la charge de la mère,

La recherche de la paternité est interdite.

Ainsi donc, Messieurs, ne vous gênez pas, séduisez les filles en leur promettant le mariage, signez cette promesse de votre plus beau paraphe ; soyez, de fait, pères de plusieurs enfants et laissez aux filles, qui gagnent si peu, la charge de les élever ; vous n’avez rien à craindre. La femme est condamnée par la loi et par ’opinion à porter le fardeau de ses fautes et des vôtres ; car c’est une créature tout à la fois bien faible et bien forte : faible, pour qu’on puisse l’opprimer, forte, plus forte que vous, pour qu’on puisse la condamner : elle a le sort de toutes les victimes.

La jeune femme. À ces critiques, j’ai souvent entendu répondre : Que les mères gardent leurs filles ! Et j’ai dit : garder ses filles est facile aux privilégiées ; mais est-ce que les ouvrières peuvent garder les leurs qui vont en apprentissage à onze ou douze ans ? Est-ce qu’elles peuvent les accompagner dans leurs ateliers, lorsqu’elles vont essayer ou reporter de l’ouvrage ? Si l’on convient que les filles ont besoin d’être gardées, et qu’il n’y ait qu’une imperceptible minorité de mères qui puissent exercer cette surveillance, il est clair que le devoir social est de faire des lois pour les protéger toutes.

L’auteur. Parfaitement raisonné. Madame ; mais pour transformer la loi, il faut travailler à transformer l’opinion. Vous voyez que les femmes acceptent les deux Morales ; qu’elles ne se sentent pas monter la honte au front de ce que leur sexe est sacrifié à la dégoûtante lubricité de l’autre. Loin de là, ces esclaves sans pensée jettent la pierre à la pauvre fille séduite et