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Page:Hériot - Une âme à la mer, 1929.pdf/121

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goélette ailée

Entendre le clapotis le long de la coque, être balancée et comme posée dans un grand berceau où l’eau vous entoure et glisse en chuchotant à votre oreille tout bas, une belle histoire fraîche et rieuse.

Se sentir distante et lointaine parce que posée sur la mer vous n’avez plus rien à faire avec la terre cependant proche.

L’eau mouvante vous entoure et vous protège, vous êtes à l’abri des êtres et des chagrins.

Ne plus entendre de voix humaine, — ne plus voir de larmes dans les yeux, ne plus entendre jamais rire.

Ne plus voir, ne plus sentir les vies et leurs misères. Ne plus vouloir la vie trépidante des rues, trop de bruit, trop de lâchetés, et fuir sur la Mer.

Appareiller et commencer un long voyage, avec le désir qu’il ne se terminera pas. J’ai fui, je suis à bord, je navigue…

Les heures s’écoulent, les jours passent les uns après les autres.

Oh ! continuer, ne plus toucher terre !

Mais la terre est en vue et il faut des vivres pour l’équipage.

Je reviens de la Mer !

Qu’avez-vous tous à scruter mon visage tanné ?

J’ai navigué, vu des choses que vous n’avez pas vues, des reflets que vous ne soupçonnez pas.