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Page:Hériot - Une âme à la mer, 1929.pdf/147

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goélette ailée

Avant que l’avenir nous pousse à l’horizon sans transition, nous aimons à nous attarder au temps où nous pensions moins, à l’époque heureuse où nous ne vivions pas encore de souvenirs.



Quel angoissant souvenir fut celui de « Finlandia », désarmé à Marseille, avec à bord la poignée d’hommes la plus dévouée que j’avais choisie dans l’équipage pour me suivre sur mon voilier. J’étais en pourparlers d’achat et tous attendaient la bonne nouvelle pour faire leur sac et me rejoindre au Hâvre.

Lorsque, en Juillet, en l’espace d’une semaine je perdis deux d’entre eux à l’hôpital de Marseille. Un brave chauffeur, Toudic, qui avait autrefois servi ma mère sur « Salvator », faible des poumons, mourut d’une pneumonie.

Leport, très bon marin, jeune marié, avait un fils de six mois ; il fut emporté par une fièvre typhoïde compliquée de la maladie de foie qu’il avait contractée aux Dardanelles.

Que faire pour ces braves gens ? je ne pouvais plus rien ?

Il me restait leurs veuves et leurs enfants.

Je fus empêchée de partir pour Marseille à cause