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Page:Hériot - Une âme à la mer, 1929.pdf/205

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ailée s’en va

Les embruns ont une bonne amertume et cette poussière là vous lave bien.

La terre est très lointaine, et les êtres ont rudement moins d’importance.

Cependant volontairement, vous vous pliez aux lois suprêmes du beau sport.

Avec l’orgueil et la force d’un homme, vous vous appliquez à suivre les règles, qui semblent pour ceux qui ne savent pas, un jeu d’enfant.

Aussi, ivre d’embruns et d’idéal, loin de la rumeur des villes, vous êtes emporté, et tandis que vous vous élevez plus près de l’infini, vos yeux qui songent et plongent cherchent Dieu !

Et c’est peut-être parce que j’aime mes bateaux comme des êtres chers, qu’ils me donnent de si douces joies. À leur façon, ils savent me rendre mon affection avec mon dévouement.

Lorsque « Ailée » s’éloigne, prend le large sans moi, mes yeux se brouillent et mon cœur la suit en l’accompagnant.

J’éprouve cette même angoisse chaque fois que je quitte ma chère Mère pour une longue absence.

Je me suis apprise à aimer les bateaux comme des êtres chers.

Après le dur contact avec la vie, que j’eus très jeune, au moment où tout semblait me sourire et me combler, j’eus le bon sens de réfugier mon intérêt et ma tendresse dans les bateaux,