La profondeur glauque des vagues énormes vient se briser le long des roches.
La teinte adoucie du morne granit tout déchiqueté, continue la mer, continue le ciel !
Cette beauté environnante, je la respire et m’en imprègne toute.
Mon âme se retrouve, se dissout d’abandon, dans ce paysage rude. Mon navire arrive au pied des Rochers des Tas de Pois. Quel chaos ! quel déchirement de pierres que ces profils amoncelés de roches !
Mon commandant est un des pilotes de la flotte, capable de passer le long de ces rochers, de ces récifs épars. Il me demande la permission de répéter un exploit qu’il accomplit deux fois dans sa carrière. La première fois avec un navire de guerre (après avoir les félicitations de l’Amiral, on lui adressa un blâme, car les vaisseaux de files n’avaient pas osé le suivre dans sa manœuvre), la seconde fois ce fut avec le beau voilier Navaho.
Aujourd’hui par grosse houle, il va s’engager entre les deux énormes cailloux, hauts comme des montagnes, étroits comme un passage.
L’instant est impressionnant ! Tout l’équipage se masse à l’avant regardant de tous ses yeux.
Un grand silence tombe sur nous.
Sur la passerelle mon cœur bat, précipité. Guégen à la barre, en est pâle. Le commandant risque mon navire et ses soixante âmes ! La moindre fausse manœuvre, et nous serions en miettes !