Page:Hériot - Une âme à la mer, 1929.pdf/97

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
91
goélette ailée

terrifiant c’est là, nous sommes drossés dessus. On hisse le pavillon de détresse.

Pendant une heure aucune visibilité.

« Madame », dit mon capitaine, « il n’y a plus rien à faire ; si ce temps persiste, la mer nous mange ».

« Je sais, Beuzit, je sais ».

La côte est là — choisir — y aller, ou empanner.

Si on empanne, la bôme peut crever la coque ; après discussion, nous allons essayer d’empanner.

Mais Ailée ne gouverne plus. L’équipage est là au complet. Dans un grand silence l’ordre est donné, Tous les regards sont tendus vers la manœuvre. Nous avons empanné.

Sous le choc, les épaules se voûtent en attente rien de plus, et nous naviguons encore.

Sous un choc effroyable, la grand’voile se déchire. La bôme qui pèse cinq tonnes et qui a vingt-quatre mètres de long s’engage dans la mer, menaçant à chaque instant de défoncer le rouf et d’enlever le gouvernail.

Beuzit commande : « Toi… vite ! » Sa main s’est abattue sur une épaule et la secoue. La parole lui manque, puis il crie :

« Va, coupe tout ! » Le brave Mescam, une haussière sous les bras, son couteau dans la bouche, se prépare à monter au bas-mât qui vacille. À ce moment, le mât de flèche vient s’écraser dessus. « N’y