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une âme à la mer

va pas… » hurle Beuzit. Mescam monte quand même, puisque ce travail doit être fait !

Mes mains compriment mon cœur.

La misaine est arrachée en lambeaux. Nous dérivons. Il faut envoyer une drisse supplémentaire au grand mât pour installer un foc de fortune.

Postic, Corre, Cazoulat s’apprêtent à monter, mais la manœuvre sur ce bas-mât qui vacille et manque à chaque instant de tomber sur nos têtes est terrifiante. Et les voilà, héroïques, qui s’engagent en haut pour sauver Ailée.

3 heures ! J’ai faim.

« Dites en bas que j’ai l’intention de déjeûner… » Oui, en effet, j’ai faim. Sur la ration de l’équipage, j’ai pris du café et du cognac, je claquais des dents de froid.

Je remonte sur le pont. La situation a empiré, je redescends dans le carré pour ne plus voir ce qui se passe là-haut, pour ne plus assister sans avoir la force d’aider à la manœuvre infernale qui consiste à arrimer cette bôme.

Dans chaque houle elle se soulève au loin, pour revenir en grand enlever le gouvernail et défoncer la descente. L’équipage entier est là. Quand elle revient dans la houle, les hommes s’agrippent, puis sont obligés de fuir pour ne pas être écrasés par elle. Quand elle s’éloigne, ils se précipitent pour passer l’aussière.

J’adresse à Notre-Dame-des-Flots une rapide prière.