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goélette ailée

« Non, non ce n’est pas possible, je ne verrai pas mon équipage disparaître sous mes yeux ! Notre-Dame je vous en supplie ! »

Ma Demoiselle de Compagnie, assise sur les marches de la descente, pieusement dit un chapelet après un autre.

Nous faisons tous notre devoir. On a envoyé le signal par le mât de pavillon arrière qui signifie : « remorqueur et pilote ». Mais la mer nous enserre, nous étouffe, et j’ai l’impression d’être au fond d’un gouffre d’eau.

Personne ne peut nous apercevoir, la mer est trop haute. Je garde le sourire aux lèvres, mais mon capitaine est écrasé par sa responsabilité.

Il commande : « Guéguen, envoie le pavillon tricolore ». C’est le pavillon de détresse, celui que l’on envoie quand soi-même on ne peut plus rien, quand on demande au destin, à ceux qui passeront de vous secourir !

Et je revoyais un très beau tableau que j’avais admiré en Juillet au club des officiers à Horten en Norvège, c’était justement un pavillon Français et un grand voilier qui sombrait.

Dans la voix de Guéguen une détresse passe :

« J’peux pas, il n’y a plus rien ici pour ! »

Le magasin a été pillé, plus une drisse à la traîne. Alors je dis :

« Tu voudrais, peut-être, Guéguen, que j’aille te