Page:Hérodote - Histoire, trad. Larcher, tome 1, 1850.djvu/126

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion
127
CLIO, LIVRE I.

occupent la plus grande partie de cette plaine spacieuse. Plusieurs considérations importantes engageaient ce prince dans cette guerre, et l’y animaient. La première était sa naissance, qui lui paraissait avoir quelque chose de plus qu’humain ; la seconde, le bonheur qui l’avait toujours accompagné dans ses guerres. Toutes les nations, en effet, contre qui Cyrus tourna ses armes, furent subjuguées ; aucune ne put l’éviter.

CCV. Tomyris, veuve du dernier roi, régnait alors sur les Massagètes. Cyrus lui envoya des ambassadeurs, sous prétexte de la rechercher en mariage. Mais cette princesse, comprenant qu’il était plus épris de la couronne des Massagètes que de sa personne, lui interdit l’entrée de ses États. Cyrus, voyant que ses artifices n’avaient point réussi, marcha ouvertement contre les Massagètes, et s’avança jusqu’à l’Araxe. Il jeta un pont sur ce fleuve pour en faciliter le passage, et fit élever des tours sur des bateaux destinés à passer ses troupes.

CCVI. Pendant qu’il était occupé de ces travaux, Tomyris lui envoya un ambassadeur, qu’elle chargea de lui parler ainsi : « Roi des Mèdes, cesse de hâter une entreprise dont tu ignores si l’événement tournera à ton avantage, et, content de régner sur tes propres sujets, regarde-nous tranquillement régner sur les nôtres. Si tu ne veux pas suivre mes conseils, si tu préfères tout autre parti au repos, enfin si tu as tant d’envie d’éprouver tes forces contre celles des Massagètes, discontinue le pont que tu as commencé. Nous nous retirerons à trois journées de ce fleuve, pour te donner le temps de passer dans notre pays ; ou, si tu aimes mieux nous recevoir dans le tien, fais comme nous. »

Cyrus convoqua là-dessus les principaux d’entre les Perses, et, ayant mis l’affaire en délibération, il voulut avoir leur avis. Ils s’accordèrent tous à recevoir Tomyris et son armée sur leurs terres.

CCVII. Crésus, qui était présent aux délibérations, désapprouva cet avis, et en proposa un tout opposé. « Seigneur, dit-il à Cyrus, je vous ai toujours assuré que,