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EUTERPE, LIVRE II.

les rois, ses prédécesseurs, leur avaient données à chacun par distinction : mais, dans la suite, lorsque Sanacharib, roi des Arabes et des Assyriens[1], vint attaquer l’Égypte avec une armée nombreuse, les gens de guerre ne voulurent point marcher au secours de la patrie. Le prêtre, se trouvant alors fort embarrassé, se retira dans le temple, et se mit à gémir devant la statue du dieu sur le sort fâcheux qu’il courait risque d’éprouver. Pendant qu’il déplorait ainsi ses malheurs, il s’endormit, et crut voir le dieu lui apparaître, l’encourager, et l’assurer que, s’il marchait à la rencontre des Arabes, il ne lui arriverait aucun mal, et que lui-même il lui enverrait du secours.

Plein de confiance en cette vision, Séthos prit avec lui tous les gens de bonne volonté, se mit à leur tête, et alla camper à Péluse, qui est la clef de l’Égypte. Cette armée n’était composée que de marchands, d’artisans, et de gens de la lie du peuple[2] : aucun homme de guerre ne l’accompagna. Ces troupes étant arrivées à Péluse, une multitude prodigieuse de rats de campagne se répandit la nuit dans le camp ennemi, et rongea les carquois, les arcs et les courroies qui servaient à manier les boucliers ; de sorte que, le lendemain, les Arabes étant sans armes, la plupart périrent dans la fuite. On voit encore aujourd’hui dans le temple de Vulcain une statue de pierre qui représente ce roi ayant un rat sur la main, avec cette inscription : Qui que tu sois, apprends, en me voyant, à respecter les dieux.

CXLII. Jusqu’à cet endroit de mon histoire, les Egyptiens et leurs prêtres me firent voir que, depuis leur pre-

    un pouce en carré. L’arpent étant de neuf cents toises carrées, l’aroure sera moins forte que l’arpent de soixante-dix toises. (L.)

  1. Les Arabes qui habitaient au delà du Jourdain et dans l’Arabie Pétrée étaient soumis au roi d’Assyrie. (L.)
  2. Les Égyptiens étaient partagés en trois classes : celle des gens de qualité, qui parvenaient aux honneurs, et occupaient, de même que les prêtres, les places distinguées ; celle des gens de guerre, qui cultivaient aussi la terre ; enfin celle des ouvriers, qui exerçaient les emplois les plus vils. La première classe comprenait aussi les prêtres, ou, pour mieux dire, les places de distinction étaient réservées aux prêtres. La dernière classe, qui devait être très-nombreuse, se subdivisait encore. (L.)