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THALIE, LIVRE III.

ciens mettent à la proue de leurs trirèmes. Ces pataïques, pour en donner une idée à ceux qui ne les ont point vus, ressemblent à un pygmée. Il entra aussi dans le temple des Cabires, dont les lois interdisent l’entrée à tout autre qu’au prêtre. Après plusieurs insultes et railleries, il en fit brûler les statues. Elles ressemblent à celles de Vulcain. On dit, en effet, que les Cabires sont fils de ce dieu.

XXXVIII. Je suis convaincu par tous ces traits que Cambyse n’était qu’un furieux ; car, sans cela, il n’aurait jamais entrepris de se jouer de la religion et des lois.

Si l’on proposait en effet à tous les hommes de faire un choix parmi les meilleures lois qui s’observent dans les divers pays, il est certain que, après un examen réfléchi, chacun se déterminerait pour celles de sa patrie : tant il est vrai que tout homme est persuadé qu’il n’en est point de plus belles. Il n’y a donc nulle apparence que tout autre qu’un insensé et un furieux en fit un sujet de dérision.

Que tous les hommes soient dans ces sentiments touchant leurs lois et leurs usages, c’est une vérité qu’on peut confirmer par plusieurs exemples, et entre autres par celui-ci : Un jour Darius, ayant appelé près de lui des Grecs soumis à sa domination, leur demanda pour quelle somme ils pourraient se résoudre à se nourrir des corps morts de leurs pères. Tous répondirent qu’ils ne le feraient jamais, quelque argent qu’on pût leur donner. Il fit venir ensuite les Calaties, peuples des Indes, qui mangent leurs pères ; il leur demanda en présence des Grecs, à qui un interprète expliquait tout ce qui se disait de part et d’autre, quelle somme d’argent pourrait les engager à brûler leurs pères après leur mort. Les Indiens, se récriant à cette question, le prièrent de ne leur pas tenir un langage si odieux : tant la coutume a de force. Aussi rien ne me paraît plus vrai que ce mot que l’on trouve

    faire croire que les pataïques n’étaient pas des dieux, c’est que les anciens ne mettaient qu’à la poupe les figures des dieux tutélaires des vaisseaux, et jamais à la proue, et que cette dernière place était destinée seulement à des figures d’animaux qui donnaient le nom aux vaisseaux. (L.)

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