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MELPOMÈNE, LIVRE IV.

CXVI. Les jeunes Scythes y consentirent. Ils passèrent le Tanaïs ; et, ayant marché trois jours à l’est, et autant depuis le Palus-Mæotis vers le nord, ils arrivèrent dans le pays qu’ils habitent encore maintenant, et où ils fixèrent leur demeure. De la vient que les femmes des Sauromates ont conservé leurs anciennes coutumes : elles montent à cheval, et vont à la chasse, tantôt seules et tantôt avec leurs maris. Elles les accompagnent aussi à la guerre, et portent les mêmes habits qu’eux.

CXVII. Les Sauromates font usage de la langue scythe ; mais, depuis leur origine, ils ne l’ont jamais parlée avec pureté, parce que les Amazones ne la savaient qu’imparfaitement. Quant aux mariages, ils ont réglé qu’une fille ne pourrait se marier qu’elle n’eût tué un ennemi[1]. Aussi y en a-t-il qui, ne pouvant accomplir la loi, meurent de vieillesse sans avoir été mariées.

CXVIII. Les ambassadeurs des Scythes, ayant été admis à l’assemblée des rois des nations dont nous venons de parler, apprirent à ces princes que Darius, après avoir entièrement subjugué l’autre continent (l’Asie), était passé dans le leur sur un pont de bateaux qu’il avait fait construire à l’endroit le plus étroit du Bosphore ; qu’il avait ensuite soumis les Thraces et traversé l’Ister sur un pont, à dessein de se rendre maître de leur pays. « Il ne serait pas juste, ajoutèrent-ils, que, gardant la neutralité, vous nous laissiez périr par votre négligence : marchons donc de concert au-devant de l’ennemi qui vient envahir notre patrie. Si vous nous refusez, et que nous nous trouvions pressés, nous quitterons le pays ; ou, si nous y restons, ce sera aux conditions que nous imposeront les Perses : car enfin que faire à cela, si vous ne voulez pas nous donner de secours ? Ne vous flattez pas que votre sort en soit meilleur, et que, contents de nous

  1. « Les femmes des Sauromates, dit Hippocrate, montent à cheval, tirent de l’arc, lancent le javelot de dessus le cheval, et vont à la guerre, tant qu’elles sont filles. Elles ne se marient point qu’elles n’aient tué trois ennemis, et ne cohabitent point avec leurs maris qu’elles n’aient fait les cérémonies sacrées prescrites par la loi. Les femmes mariées cessent d’aller à cheval, à moins qu’il ne soit nécessaire de faire une expédition générale. » (L.)

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