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TERPSICHORE, LIVRE V.

point dépendre de ce prince, il alla fonder une colonie avec ceux qu’il avait demandés. Il était tellement indigné, qu’il s’embarqua pour la Libye sans consulter l’oracle sur le lieu où il l’établirait, et sans observer aucune des cérémonies usitées en pareille occasion. Il y arriva, conduit par des Théréens qui lui servirent de guides, et s’établit à Cinyps, très-beau canton de la Libye, et sur les bords du fleuve. Mais, en ayant été chassé la troisième année par les Maces, peuple libyen d’origine, et par les Carthaginois, il revint dans le Péloponnèse.

XLIII. Il y trouva Anticharès d’Éléon, qui lui conseilla, suivant les oracles rendus à Laïus, de fonder en Sicile Héraclée, parce que le pays d’Eryx appartenait, disait-il, en entier aux Héraclides, par l’acquisition qu’en avait faite Hercule[1]. Là-dessus il alla consulter l’oracle de Delphes, afin de savoir s’il se rendrait maître du pays pour lequel il était prêt à partir. La Pythie lui ayant répondu qu’il s’en emparerait, il monta sur la flotte qui l’avait mené en Libye, et longea les côtes d’Italie.

XLIV. Les Sybarites se disposaient alors, comme ils le disent eux-mêmes, à marcher avec Télys, leur roi, contre la ville de Crotone. Ils ajoutent que les Crotoniates effrayés prièrent Doriée de leur donner du secours, et que, celui-ci leur en ayant accordé, ils attaquèrent avec lui la ville de Sybaris et la prirent[2]. Telle est la manière dont

  1. « Hercule, désirant faire le tour entier de la Sicile, partit du promontoire Pélorias pour se rendre vers Eryx. En s’approchant du pays qui est près d’Eryx, Eryx, fils de Vénus et de Butès, qui avait régné auparavant en ces lieux, le défia à la lutte. Comme Eryx avait mis son pays pour prix du combat, et Hercule ses bœufs, le premier se fâcha d’abord, parce que ses bœufs n’étaient pas d’un prix proportionné à celui du pays ; mais Hercule lui ayant fait voir que s’il perdait ses bœufs il serait aussi privé de l’immortalité, Eryx accepta la condition, et ayant été vaincu, il fut dépouillé de ses terres. Hercule laissa ce pays aux habitants, et leur permit d’en tirer les fruits, jusqu’à ce qu’un de ses descendants vint le redemander, ce qui ne manque pas d’arriver ; car, grand nombre de générations après, Doriée de Lacédémone vint en Sicile, recouvra ce pays, et y bâtit la ville d’Héraclée. » (Diod. Sicul., lib. iv, § 23).
  2. Sybaris était une ville puissante, gouvernée par Télys, qui en était le démagogue. Cet homme persuada par ses accusations aux Sybarites de bannir cinq cents des plus puissantes d’entre les citoyens, et de vendre leurs biens à l’encan. Les exilés se retirèrent à Crotone, et se réfugièrent auprès des autels