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CLIO, LIVRE I.

les Alcmænides passaient pour être sous l’anathème[1], ne voulant point avoir d’enfants de sa nouvelle femme, il n’avait avec elle qu’un commerce contre nature. La jeune femme tint dans les commencements cet outrage secret ; mais dans la suite elle le révéla de son propre mouvement à sa mère, ou sur les questions que celle-ci lui fit. Sa mère en fit part à Mégaclès, son mari, qui, indigné de l’affront que lui faisait son gendre, se réconcilia, dans sa colère, avec la faction opposée.

Pisistrate, informé de ce qui se tramait contre lui, abandonna l’Attique et se retira à Érétrie[2], où il tint conseil avec ses fils. Hippias lui conseilla de recouvrer la tyrannie. Son avis prévalut. Des villes auxquelles les Pisistratides avaient rendu auparavant quelque service leur firent des présents ; ils les acceptèrent et les recueillirent. Plusieurs donnèrent des sommes considérables ; mais les Thébains se distinguèrent par leur libéralité. Quelque temps après, pour le dire en peu de mots, tout se trouva prêt pour leur retour. Il leur vint du Péloponnèse des troupes argiennes qu’ils prirent à leur solde, et un Naxien nommé Lygdamis[3] redoubla leur ardeur par un secours volontaire de troupes et d’argent.

LXII. Ils partirent donc d’Érétrie et revinrent dans l’Attique au commencement de la onzième année. D’abord ils

  1. Mégaclès, qui était archonte dans le temps de la conjuration de Cylon, en fit égorger les complices au pied des autels où ils s’étaient réfugiés. Tous ceux qui avaient eu part à ces meurtres furent regardés comme des gens abominables. Les partisans de Cylon, ayant repris des forces, étaient perpétuellement en guerre avec la famille de Mégaclès. Au fort de la sédition, et le peuple étant partagé, Solon s’avança au milieu, et persuada à ceux qu’on appela les abominables de se soumettre au jugement de trois cents des principaux citoyens. Ils furent condamnés. On bannit ceux qui étaient encore en vie ; on déterra les morts, et on jeta leurs cadavres hors des frontières de l’Attique. (L.)
  2. Il y avait deux villes de ce nom, l’une en Thessalie, l’autre en Eubée. Pisistrate se retira dans la dernière, puisqu’il partit de l’Eubée pour revenir dans l’Attique, et que son port était commode pour faire une descente dans ce pays. (L.)
  3. Ce Lygdamis était un ami de Pisistrate. Celui-ci ayant fait la conquête de l’île de Naxos, il en confia le gouvernement à Lygdamis, ou plutôt il lui en donna la tyrannie ; car Polyæn dit qu’il en était tyran. Lygdamis aida Polycrate à devenir tyran de Samos. (L.)