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ÉRATO, LIVRE VI.

la poupe, eut la main coupée d’un coup de hache, et fut tué, ainsi que beaucoup d’autres Athéniens de distinction.

CXV. Ce fut ainsi que les Athéniens s’emparèrent de sept vaisseaux ennemis. Les barbares se retirèrent avec le reste de leur flotte, sans revirer de bord ; et, ayant repris les esclaves d’Érétrie dans l’île[1] où ils les avaient laissés, ils doublèrent le promontoire Sunium, dans le dessein de prévenir les Athéniens, et d’arriver dans leur ville avant eux. On prétend à Athènes qu’ils conçurent ce projet par l’artifice des Alcméonides, qui, selon les conventions faites avec eux, leur montrèrent un bouclier tandis qu’ils étaient déjà sur leurs vaisseaux.

CXVI. Pendant que les Perses doublaient le promontoire Sunium, les Athéniens accoururent à toutes jambes au secours de leur ville, et prévinrent l’arrivée des barbares. Ils partirent d’un lieu consacré à Hercule à Marathon, et campèrent dans un autre consacré au même dieu à Cynosarges. Les Perses jetèrent l’ancre au-dessus de Phalère, qui servait alors de port aux Athéniens, et, après y être restés quelque temps, ils reprirent la route d’Asie.

CXVII. Il périt à la journée de Marathon environ six mille quatre cents hommes du côté des barbares, et cent quatre-vingt-douze de celui des Athéniens. Telle est au juste la perte des uns et des autres[2]. Il arriva en cette bataille une chose bien étonnante à un Athénien nommé Épizélus, fils de Cuphagoras. Pendant qu’il était aux prises avec l’ennemi, et qu’il se conduisait en homme de cœur, il perdit la vue sans avoir été frappé en aucune partie du corps, ni de près ni de loin, et depuis ce moment il de-

  1. L’île d’Ægilia.
  2. Cette bataille fut peinte dans le Portique, auquel la variété de ses peintures avait fait donner le nom de Pœcile, et qui s’appelait proprement le Pisanactée. Les Platéens, et tous les Athéniens qui combattirent contre les Perses, y étaient représentés. Au commencement de la bataille, la victoire ne penche pas plus d’un côté que d’un autre ; mais, lorsqu’elle est plus avancée, vous voyez les barbares fuir et se pousser les uns les autres dans un marais. À l’extrémité du tableau vous apercevez les vaisseaux phéniciens, et les Grecs qui massacrent les Perses qui veulent s’y jeter. Pline rapporte que la peinture était déjà à un haut point de perfection, et que Miltiade, Callimaque, Cynégire, du côté des Athéniens, Datis et Artapherne, de celui des barbares, y étaient peints d’après nature. (L.)