lequel est à la fois son objet et son prix. La récompense de la vertu, c’est la vertu, le châtiment de l’homme vicieux, c’est le vice. Que l’homme soit mortel ou non, la mort n’en est pas moins chose de peu d’importance, et quel que soit l’état qui suit la mort, on n’a pas le droit de s’écarter de la voie du bien. — De telles paroles, qui se trouvent au chapitre xiv du livre, rappellent l’apologie de Socrate, tout en annonçant la conception éthique de Spinoza et de Kant. Sans doute, plusieurs humanistes avaient affirmé l’idée d’une morale indépendante, mais chez Pomponazzi cette idée prend une importance particulière à cause du rapport qu’elle a avec un problème spécialement religieux dans lequel elle apparaît.
La question de l’immortalité est d’après Pomponazzi un problème insoluble (problema neutrum) ; on peut ajouter mentalement, problème neutre en ce sens également, que de sa solution ne dépend pas de valeur morale. Mais en ces sortes de questions il importe de fixer la portée réelle de notre connaissance.
Pour Pomponazzi, l’intérêt principal de ses recherches est évidemment lié au jour qu’elles jetteront sur la nature de notre connaissance. Le problème n’en est que l’occasion. Il distingue nettement le point de vue du philosophe de celui du législateur. Pour le législateur, il s’agit de trouver des motifs capables de rendre l’homme honnête, et peut-être s’imagine-t-il être dans le vrai, en se servant de la croyance à l’immortalité comme d’un mobile d’éducation ; le philosophe n’a qu’à s’occuper de la vérité, sans se laisser abuser par la crainte ou par l’espérance. On peut, d’après Pomponazzi, trouver le même contraste dans l’individu. Avec la raison, il ne cherche qu’à tirer d’hypothèses données des conclusions exactes ; les résultats auxquels aboutit la raison ne dépendent donc pas de la volonté de l’homme. Par sa volonté, l’homme peut rester fidèle à une croyance que sa raison ne peut fonder. Pomponazzi distingue donc entre foi et science, et relativement à la solution définitive du problème qu’il traite, il peut se soumettre à l’enseignement de l’Église. Alors que le scolastique Duns Scot avait déclaré deux siècles auparavant que quelque chose pouvait être vrai pour le philosophe, sans être vrai pour le théologien, la conception de Pom-