Page:Höffding - Histoire de la philosophie moderne.djvu/7

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


LIVRE PREMIER

LA PHILOSOPHIE DE LA RENAISSANCE


1. — La Renaissance et le Moyen Âge

Ce qui caractérise cette période de la vie de l’esprit européen qu’on appelle l’ère de la Renaissance, c’est, d’une part, qu’elle a rompu avec la conception bornée de la vie que se faisait le Moyen Âge, conception dénuée de liberté et de cohérence, et de l’autre, qu’elle a ouvert au regard des horizons nouveaux et fait épanouir de fraîches facultés intellectuelles. À toute naissance, il se produit deux actions simultanées : la séparation violente d’avec l’être ancien et le développement d’une existence nouvelle. Mais il est, à coup sûr, unique dans la vie de l’esprit humain de voir les deux faces du passage à une nouvelle période ressortir aussi brillamment qu’ici. Dans d’autres périodes de transition, la critique et la négation, ou la vigueur et l’abondance positive, revêtent un caractère dominant. À ce point de vue, il est caractéristique de la Renaissance que c’est principalement la vie nouvelle qui amène la critique du passé. C’est à cela qu’elle doit sa santé et sa force. Elle a fondé une conception nouvelle, libre et humaine, de la nature et de la vie qu’elle-même ne put qu’exprimer dans ses grands traits, et dont le développement par le détail révéla qu’elle contenait des problèmes suffisants pour la pensée et l’investigation de plusieurs siècles. Cependant cette conception n’a pas subi de changement essentiel dans ses traits principaux. Quand on essaye de s’orienter dans les grands problèmes théoriques et pratiques en suivant le fil de l’histoire, il faut donc remonter à l’époque qui possède assez de verdeur et de force pour s’épanouir, et